Heidegger - Introduction à l’investigation phénoménologique
Le cours universitaire "Introduction à l’étude phénoménologique" du semestre d’hiver 1923-24 est le premier organisé par Heidegger à Marburg. Nous présentons ici une analyse approfondie de la phénoménologie qui affirme d’une part pour la première fois le détachement de la pensée de Heidegger de Husserl et de l’autre montre dans ses traits fondamentaux le caractère herméneutique qui marquera la même ontologie fondamentale. Cela passe notamment par l’introduction dans une fonction dominante du concept de soin, qui détermine l’être même d’être là et donc la manière originale pour l’homme d’être dans le monde. Enfin, le détachement de Husserl et sa conception de la philosophie se déroule sur le chemin d’une comparaison minutieuse avec Descartes, la plus étendue que l’on retrouve dans l’œuvre de Heidegger.

L’intention de Heidegger est de construire une ontologie fondamentale qui, sur les traces du dernier Husserl, cherche la nature constitutive des objets du monde à partir du sujet et de la conscience transcendantale [87] qui les rend en quelque sorte possibles. Husserl avait au contraire souligné la nécessité d’étudier la subjectivité de manière non abstraite et générique, mais en relation avec les objets du monde et de l’histoire: en ce sens, il avait initié l’exploration des soi-disant "ontologies régionales", c’est-à-dire de ces sciences orientées vers l’étude d’aspects ou de régions particulières de la réalité, comme la logique ou les mathématiques, d’un point de vue a priori, c’est-à-dire sur la base de leurs essences idéales. La tentative de Husserl de donner du concret au sujet transcendantal, cependant, selon Heidegger n’était pas suffisante, car nous devons également prendre en compte sa finitude et le drame de son existence historique. En construisant son ontologie, c’est-à-dire la science qui décrit l’être et ses structures fondamentales, Heidegger estime qu’il faut partir du sujet qui pose la question de ce qu’est l’être, c’est-à-dire l’homme. L’homme a eu une relation problématique avec la définition de l’être, le concevant finalement comme "l’objectivité", comme une simple présence, comme la qualité pour laquelle différents objets ou entités sont placés devant moi (ob-jecta en latin). Cette définition ne prend pas en compte l’homme lui-même, auquel les objets sont présents, mais qui n’est pas une simple présence dans le monde, mais une «prise en charge» de celui-ci, une action orientée vers l’avenir qui travaille continuellement vers un but. En fait, selon Heidegger, l’existence de l’homme signifie essentiellement transcendance, mais en même temps vers le monde, pour le façonner et le concevoir. L’homme n’est donc pas une présence mais un projet, ou bien un être (Dasein), [90] être dans le monde, comme un nœud inextricable de situations dans lesquelles il se trouve.

Si nous voulons être comment concevoir, la conception de l’être des objets, ou des «entités intramondaines» change aussi: ce ne sont plus des présences qui subsistent indépendamment de nous, car cela nous fait croire à la méthode scientifique, mais elles viennent vu comme des outils selon notre projet. Un projet qui consiste précisément dans la «préoccupation» de tels instruments, en prenant soin d’eux au sens latin du terme, tâche que l’homme, de par sa nature, a envers eux. De plus, même l’objectivité présumée avec laquelle la technique dit de les regarder est en fait fonction de leur instrumentalité ou de leur utilité. Parce que chaque instrument coopère avec d’autres instruments en vue d’un horizon plus large qui est la fin ultime à laquelle ils doivent servir. , ils doivent être compris dans une totalité, à la lumière du monde global créé et unifié par l’homme qui poursuit ses projets. Cela signifie que l’être de ces entités intramondaines est donné par le fait qu’il y a l’homme: c’est l’homme qui les fait naître.



Ce résultat, qui rapproche à certains égards Heidegger de l’idéalisme transcendantal et de la conscience phénoménologique, dont il a été le sujet pour créer l’objet, est maintenant conduit par Heidegger à son propre besoin de le relier au concret de l’existence. . Le fait, en effet, qu’en concevant le monde le fait devenir conscience transcendantale, se trouve à son tour «conçu»: lui-même est un projet lancé (Geworfenheit); il naît et meurt sans l’avoir décidé, et il est limité par sa finitude. Le Dasein désigne donc d’une part la liberté (comme transcendance), d’autre part, cependant, cette même liberté implique d’accepter les conditions dans lesquelles elle va s’exprimer (immanence).

Chaque projet étant limité par la mort, il se retrouve plongé dans une dimension temporelle, carrefour du passé, du présent et du futur. Et puisque, comme nous l’avons vu, les objets intramondains naissent à travers ce projet historico-temporel qu’est l’homme, nous pouvons dire que l’être est donné dans le temps; un concept, celui-ci, déjà de dérivation néo-platonicienne et augustinienne, pour lequel l’être non seulement "est", mais précisément "nous donnons", "arrive", se révélant à l’horizon de l’histoire, où ce qui sera destiné à tomber dans ce qui a été, et à la destinée de qui l’homme est appelé à prêter loyauté. Heidegger dira plus tard: "L’avenir est à l’origine de l’histoire. [...] Le commencement est encore. Il n’est pas derrière nous, comme un événement de longue date, mais en face de nous, devant nous. Le commencement, en tant qu’il est ce qui est le plus grand, précède tout ce qui est sur le point de se produire et est donc déjà passé au-delà de nous, au-dessus de nous ". [98] Les réflexions supplémentaires de Heidegger sur la consonance entre l’être et le temps sont inachevées en raison de l’impossibilité d’avoir une terminologie linguistique adéquate qui n’a pas été héritée de la métaphysique traditionnelle..
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